Bogolan, le tissu de la terre

En dioula (langue parlée au Mali, Burkina Faso et Côte d’Ivoire), le Bogo signifie terre et lan tissu. En réalité le bogolan vient du Mali mais les burkinabè ont aussi appris à le fabriquer. A l’origine les donzos se servaient de cette étoffe comme tenue de camouflage pour chasser puis progressivement le bogolan est devenu essentiellement décoratif.

Teinture traditionnelle sur tissu naturel

La base du bogolan consiste en des lanières de cotons naturels de 8 à 12 cm ensuite assemblées. Le coton est récolté à Kaya (100 kilomètres) au nord du Burkina par les femmes qui le filent ensuite. Puis les hommes sont chargés de le tisser et de l’assembler pour fabriquer les pagnes.

Les teintures et les matériaux utilisés sont entièrement naturels. L’artisan en fonction du rendu souhaité ou du temps dont il dispose va utiliser différentes plantes tinctoriales comme les écorces de baobabs ou les raisins sauvages. Seul le pinceau qui permettra de poser la teinture est un hybride entre un stylo BIC et une brosse à dent.

Pour l’atelier que je présente, il n’y aura que deux plantes : le ciga en morée (langue du Burkina) ou galama en dioula. C’est la plante qui donnera la couleur jaune. Cette plante est récoltée dans la forêt par les femmes et fait aussi partie de la pharmacopée traditionnelle. Pour obtenir le rouge seront utilisées les écorces de mil. Le dernier élément dont l’artisan teinturier a besoin est l’argile qui est le résultat de la fermentation de sorgho, maïs et mil mélangés avec un peu de terre.

L’atelier a eu lieu durant 3 matinées pendant les vacances de noël 2020. Deux techniques de design sont utilisées sur deux fonds différents.

Dessins à main levée sur fond blanc

Etape 1

Après avoir laissé tremper le ciga pendant 30 minutes dans de l’eau, il faut recouvrir les motifs préalablement dessinés à la craie sur le tissu avec de la teinture. Nous réalisons deux bandes : une avec deux motifs, « les oiseaux qui n’ont pas de limites » et des pattes de chameaux. L’autre représente la terre et des décorations Tiébélés (ce sont des motifs traditionnels que l’on trouve dans le village de Tiébélé au sud du Burkina). Il est nécessaire de repasser le ciga sur le motif à 3 reprises. Entre les couches, l’étoffe est séchée au soleil.

Etape 2

Le lendemain, avec le BIC-brosse à dent on recouvre le motif d’argile et on fait sécher. Quand la bande sera terminée, l’argile sur ciga permettra d’obtenir une couleur noire.

Etape 3

Une fois l’argile sec, on peint les motifs avec du ciga. C’est la même manipulation que dans l’étape numéro 1, il faut le faire à 3 reprises avec séchage entre chaque couche.

Etape 4

On peut maintenant peindre le motif avec le rouge de l’écorce de mil. On le fait comme pour le ciga à trois reprises avec séchage entre chaque couche. On comprend que le ciga est l’apprêt. Le noir et le rouge ne peuvent tenir sur le coton sans le ciga.

Etape 6

Une fois les bandes sèches, elles sont lavées à grandes eaux dans une bassine.

C’est fini !

Dessins au pochoir sur fond jaune

Etape 1

Le deuxième travail qui se fait en parallèle est une teinture sur pagne avec fond jaune. Le ciga qui a trempé pendant toute une nuit peut maintenant permettre de teindre une étoffe de grande taille. Il faudra qu’elle sèche à même la terre au soleil assez longuement.

Etape 2

Le lendemain à l’aide des pochoirs confectionnés à partir de pellicules de celluloïd recyclées, nous obtenons un joli motif central avec des fleurs et des empreintes de chameaux. Pour obtenir ceux ci nous utilisons un large pinceau pour étaler l’argile dont l’odeur forte attire les mouches pendant le séchage.

Etape 3

Puis nous reprenons notre préparation à base d’écorce de mil pour remplir les deux bandes latérales. Il faut renouveler l’opération à deux reprises avec séchage entre les deux couches.

Etape 4

Pour la bande du milieu et afin d’obtenir un marron foncé, le ciga est mélangé avec de l’argile et posé en une seule couche. Puis l’étoffe sèche à nouveau.

Etape 5

L’étape ultime consiste à laver le pagne pour retirer l’argile et faire apparaitre le noir.

Magnifique !

Un grand merci à Issa Touré, artisan du centre artisanal de Ouagadougou qui m’a initiée à la technique traditionnelle du bogolan ! Longue vie au bogolan….

Seni by Alif Naaba

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